Depuis plus de deux mille ans, la santé y est abordée autrement qu’en Occident : il ne s’agit pas de soigner la maladie mais de rétablir les flux d’énergie. D’où des outils radicalement différents des nôtres.
En Occident, nous avons tendance à associer le mot “médecine” à l’hôpital et aux médicaments, mais aussi à classer les maladies en fonction des organes et des fonctions de notre corps physique, tout en occultant souvent la partie émotionnelle et, encore plus, la dimension énergétique», résume Jean-Marc Triboulet, membre du bureau de l’Union française des professionnels de médecine traditionnelle chinoise. Rien de tel dans la vision holistique de la médecine traditionnelle chinoise, qui plonge ses racines dans des écrits vieux de plusieurs milliers d’années.
L’harmonie de l’énergie vitale
Exemple, pour des symptômes que le médecin juge liés au froid (le nez qui coule, des rhumatismes…), il préconisera des plantes de nature chaude ou tiède. Mais ce n’est pas le seul critère. Pour choisir une herbe, il devra examiner quantité d’autres correspondances. Celle de la saveur avec l’action (salé, ramollissant ; amer, dispersant…), avec le Yin (acide, amer, salé) ou le Yang (piquant, sucré), ou encore avec les cinq éléments rythmant la transformation du Yin en Yang (piquant, métal ; acide, bois ; etc.), eux-mêmes associés à des organes précis (bois, foie ; feu, cœur: terre, rate…).
Tous ces choix sont d’abord guidés par un diagnostic énergétique. Il ne s’agit pas alors de déterminer quel organe est touché ou de quelle maladie souffre un patient. L’examen a pour but de renseigner sur les perturbations qui ont mis à mal l’harmonie de l’énergie vitale devant régner au sein de l’organisme et, de même, entre l’organisme et les éléments extérieurs. Voilà pourquoi, outre des questions et des observations en tous genres (teint, voix, respiration, état émotif…), celui qui pratique la médecine chinoise traditionnelle prendra le pouls en plusieurs points, pour percevoir ce qui fait obstacle au flux de l’énergie dans le corps à travers le vaste réseau de voies appelées méridiens. Il pourra ainsi prescrire un traitement approprié. Avec, le plus souvent, non seulement un changement de régime et des herbes médicinales, mais aussi la stimulation de points précis des méridiens par le biais d’aiguilles (acupuncture), de la chaleur (moxibustion) ou de massages et, enfin, une gymnastique traditionnelle visant à maîtriser le flux d’énergie vitale (Qi Gong, Tai Chi Chuan).
Selon Jean-Marc Triboulet, choisir des aiguilles au lieu de doigts présente plusieurs intérêts sans être obligatoirement plus efficace. Dans les hôpitaux, on peut traiter plusieurs personnes à la fois. De plus, l’acupuncture se prête mieux aux études cliniques que les massages, moins faciles à reproduire à l’identique. Dans le système de santé occidental, c’est l’une des clés de son succès: ses effets ont été démontrés scientifiquement pour traiter des migraines, soulager la douleur ou prévenir les nausées et les vomissements après une chirurgie ou dans le cadre d’un accompagnement des patients en chimiothérapie. Mais ces essais sont aussi un atout en Chine. Aujourd’hui, dans les hôpitaux et les cabinets de médecine en Chine, on travaille à adapter des traitements millénaires à des symptômes jusqu’alors méconnus par la population, en rapport avec la pollution, la malbouffe, etc.